Adopter le slow-feeding

Bâtis pour manger une quinzaine d’heures par jour, les chevaux s’accommodent mal des repas à heure fixe qui sont souvent la norme dans les écuries. Là où nôtre système digestif fonctionne par cycles (prise d’alimentation – digestion – repos à vide), celui du cheval est fait pour fonctionner en continu. Manger est générateur de bien être chez lui. Dans la nature, il passe le plus clair de son temps à chercher la nourriture qui lui convient en mangeant une plante par ci, une plante par là. Le fait de se retrouver sans nourriture à disposition provoque ennui et stress.

Lorsqu’un équidé est forcé à passer à une prise d’alimentation sous forme de repas (souvent les chevaux en box, nourris matin et soir), il se retrouve le ventre vide une fois sa ration terminée. Les sucs gastriques attaquent alors la paroi de l’estomac au bout de quelques heures à vide seulement, provoquant aigreurs, douleurs, pouvant aller jusqu’à l’ulcère. Aujourd’hui, 8 chevaux de club et d’élevage sur 10 souffre d’ulcères à l’estomac.

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Léo montre des signes d’agressivité lorsque l’accès à la nourriture est limité. Quand il n’a pas peur de manquer, son comportement se calme.

Une mise en situation simple permet d’évaluer ce que nous imposons à nos chevaux. Disons que 5kg de foin sont servis dans le box à 8h du matin. Le cheval mettra environ 2h à le manger, en prenant de grosses bouchées et en remplissant d’un coup son estomac vide. A 10h00, son foin est donc fini et le cheval n’a plus aucune occupation. De plus, l’acidité de son estomac commence à créer des douleurs. Ces deux stress combinés doivent être exprimés ; certains chevaux tapent contre la porte du box, d’autre rongent le bois, d’autres encore tiquent à l’ours … Le cheval n’a plus qu’à attendre le repas du soir et recommencer tous les jours la même boucle, abîmant de plus en plus profondément son système digestif, le menant droit à la colique. Il suffit de visiter les structures dans lesquelles une brassée de foin par cheval est donnée matin et soir pour constater l’ampleur des dégâts. Léo, mon Quarter Horse, était réputé agressif avec les autres chevaux lorsque je l’ai eu. En vérité, il n’est agressif que lorsque sa liberté de mouvement ou l’accès à la nourriture sont limités. S’il a de la place pour bouger et qu’il ne craint pas de manquer, il reste calme et il partage même son foin avec les autres chevaux.

Pour pallier à ces problèmes on peut mettre le cheval au foin à volonté, mais il peut avoir tendance à manger de trop grosses quantités. Ce n’est pas idéal avec les chevaux ayant tendance à prendre de l’embonpoint ou sensibles à la fourbure. L’autre solution est l’adoption du slow feeding et des filets à foin petites mailles.

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Le filet permet au cheval de manger en prenant de petites quantités de foin à la fois, rendant ainsi le temps d’alimentation bien plus long qu’avec du foin en vrac. Il l’empêche de se gaver et limite l’ennui. De plus, il permet au cheval d’absorber le sucre moins rapidement et de mieux de métaboliser. Un outil non négligeable pour éviter la fourbure, causée entre autres par la surproduction d’insuline.

Les points positifs :

  • Il permet de respecter le cycle d’alimentation du cheval
  • Il occupe le cheval avec une activité correspondant à sa nature
  • Il permet de réduire le gaspillage de foin

Les points négatifs :

  • Il faut porter une attention particulière aux chevaux ferrés, qui peuvent s’accrocher les fers dedans.
  • Il faut bien fermer le filet, sinon les chevaux mettent la tête dedans et l’intérêt est perdu.
  • Évitez les filets rigides avec des noeuds entre les mailles. Des cas de gencives abîmées/gingivites sont survenues avec l’utilisation de tels filets. Voir ce témoignage des écuries du Berlion.

J’en ai un de 2m x 1m et un autre 1m x 0,75m. J’envisage d’en acheter un autre, ça me permet de les dispatcher dans le parc pour encourager le mouvement des chevaux et éviter bagarres et piétinements. A son arrivée, Léo, qui n’avait à priori jamais connu le filet à foin, a gratté un peu avec les antérieurs puis a très vite compris le système. Quelques minutes plus tard, il mangeait dedans sans souci.

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Deux tailles de mailles sont proposées par les fabricants : 4,5cm ou 6cm. Ils conseillent les plus petites pour les poneys et les plus grandes pour les chevaux. J’ai commencé par acheter des 6cm, mais les chevaux mangent encore assez vite. J’ai donc opté pour le 4,5cm, qui ne leur permet de prendre que de toutes petites quantités à la fois et qui étale vraiment la durée d’alimentation. Les deux tailles de mailles sont donc à disposition pour mes chevaux. Je ne conseillerais cependant pas de prendre des mailles à 4,5cm pour des chevaux n’ayant jamais mangé en filet ; mieux vaut commencer par la taille au dessus et réduire une fois qu’ils ont la technique.
C’est à mes yeux la solution la plus simple et la moins contraignante pour le propriétaire. De nombreuses tailles de filet différentes sont disponibles, ce qui permet de s’adapter à la configuration du pré et du troupeau. Les chevaux s’y habituent vite et peuvent manger sur de plus longues périodes. Le propriétaire, lui, peut décider d’investir dans de très grands filets de manière à les remplir moins souvent et diminuer le temps passé à distribuer le foin. Des filets pour roundballer sont également disponibles sur le marché.

9 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. Manon dit :

    Top article, par contre les filets à foin du coup tu les achètes où toi ? Et tu peux les remplir pour combien de temps ? C’est assez difficile sur internet de se faire une idée de la capacité que peuvent contenir les filets de la taille des mailles etc !

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    1. SaddlingUp dit :

      Je les achète sur filet-a-foin.com. C’est un site allemand à la base, avec des traductions hyper mauvaises, mais ils sont super clean ; les filets sont très résistants et l’envoie est très rapide.
      Ils ont plusieurs tailles, du tout petit au XXL et il me semble qu’ils donnent la quantité de foin de tu peux mettre dedans suivant la taille (pour mon 1mx2m, je peux mettre entre 20 et 25kg je crois).
      Le temps dépendra de la quantité de foin et de la taille du filet. Avec mes deux filets (1mx2m et 0,75mx1m), mes chevaux tiennent une dizaine d’heure

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  2. Sylviane PIFFRET dit :

    Bravo pour cet article, très intéressant..Pour ma part, j’habite sur une île, le foin est très cher car il est importé..mon cheval est au près toute la journée, mais peut être que je pourrai tester le slow-feeding le soir au box..Qu’est ce que vous en pensez?

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    1. colinegvd dit :

      C’est une bonne façon d’occuper le cheval au box en effet : il mettra plus de temps à manger et aura moins de temps pour s’ennuyer !

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  3. benjamin dit :

    Bonsoir,
    Combien de temps laissez vous le foin dans les filets ? j’ai acheté des grands filets exprès pour ne remettre du foin que tous les 2 jours mais en fait j’ai l’impression que les chevaux boudent le foin une fois qu’il est mouillé . qu’en pensez vous ? Merci pour vos articles toujours très riche et agréable à lire !

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    1. colinegvd dit :

      Quand il pleut, je m’arrange pour que le foin ne reste pas plus d’une journée dans les filets si je ne peux pas les mettre à l’abri, parce qu’en effet les miens le boudent aussi une fois mouillé !

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  4. Sara dit :

    Super article explicant le system digestif du chaval. Mon cheval a eu des ulcers, j’ai beaucoup lu sur ce thème et essayé tous les systèmes slow-feeding. Maintenant j’utilise le Porta-Grazer. Il donne la possibilité au cheval de manger le foin dans une position naturelle. C’est comme brouter. http://www.porta-grazer.ch/acceuil

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    1. colinegvd dit :

      C’est intéressant, c’est un concept de slow-feeding qui change un peu des filets. Je ne connaissais pas, merci !

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